Après son retour en équipe de France, Zinedine Zidane emmène les Bleus jusqu’en finale de la Coupe du monde 2006. Une défaite aux tirs au but face à l’Italie dans un match marqué par sa panenka et son coup de tête à Materazzi. Le parcours des hommes de Raymond Domenech dans cette compétition regorge de multiples anecdotes.
Qui aurait parié que la France serait en finale de cette Coupe du monde en Allemagne ? Peu de gens.
Hormis bien sûr Raymond Domenech : le sélectionneur des Bleus n’a eu de cesse de donner rendez-vous « le 9 juillet 2006 » au stade olympique de Berlin. Mais pas avec le résultat final espéré par les supporters tricolores. Un documentaire diffusé sur Canal+ après la compétition porte même ce titre : « Rendez-vous le 9 juillet » .
« Il revient » après avoir entendu une « voix »
Après l’Euro 2004 (défaite en quart de finale contre la Grèce), Zinedine Zidane, Lilian Thuram et Claude Makelele raccrochent les crampons. Une retraite provisoire qui dure un an.
En août 2005, les tauliers des Bleus annoncent leur retour. La décision de Zidane de revenir est le fruit d’une discussion étrange comme il le confie dans France Football : « Je ne voudrais pas qu’on en fasse des tonnes là-dessus, ni qu’on interprète mal ce que j’ai à avouer, mais ce qui m’arrive, en réalité, est assez mystique et m’échappe un peu. C’est même irrationnel ! Une nuit, à trois heures du matin, je me suis soudain réveillé et, là, j’ai parlé avec quelqu’un… Mais ça, personne ne le sait. Ni ma femme, ni personne. Jusqu’à mon dernier souffle, je ne dirai pas de qui il s’agit. C’est trop fort ! C’est une énigme, oui, mais ne cherchez pas, vous ne trouverez pas. C’est quelqu’un que vous ne rencontrerez probablement jamais… Moi-même, je ne m’explique pas cette rencontre. Cette personne existe, mais ça vient de tellement loin… Et là, durant les heures qui ont suivi, j’étais tout seul avec elle et, chez moi, j’ai pris la vraie décision de revenir. Je n’ai jamais connu ça. J’étais comme interdit devant cette force qui dictait ma conduite, et j’ai eu comme une révélation. J’ai eu soudain envie de revenir aux sources. C’est une force irrépressible qui s’est emparée de moi à ce moment-là. Je devais obéir à cette voix qui me conseillait..«
Une voix qui le guide donc. Et Raymond Domenech parvient à le convaincre ? Zizou clarifie les choses dans L’Equipe : « Il est venu me voir. OK. Mais c’est mon envie de revenir qui m’a fait revenir ! Point. »
Et de préciser : « Il y a eu d’autres éléments plus irrationnels. Mais pour s’en tenir au rationnel, c’est moi. Nos discussions avec Lilian et Claude. Ce manque des Bleus. Je reviens, je remets le maillot et c’est reparti. C’est magnifique. »
« Dieu est de retour », s’exclame Thierry Henry quand « ZZ » revient chez les Bleus : « Ce que je vais dire est fort, mais c’est la vérité. En France, tout le monde réalise que Dieu existe et qu’il est de retour en équipe de France… Voilà, Dieu est de retour. Il n’y a pas grand-chose à dire de plus. »
Sans oublier cette une mythique de L’Equipe : « Il revient ».
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Pour être au top pour cette compétition, Zizou raconte dans So Foot les coulisses de sa préparation : « J’ai commencé six mois avant la Coupe du monde, dès janvier. Un régime d’ascète. Je me couchais tous les soirs à 21h30, je ne buvais même pas un Coca-Cola. Et je bossais, je bossais, le physique, la muscu, j’avais un prof, un programme précis »
Pour l’anecdote, c’est en partie grâce au canular de l’imitateur Gérald Dahan que la France décroche son ticket pour ce Mondial. Ce dernier se fait passer pour le président Jacques Chirac auprès de Raymond Domenech et Zinedine Zidane et insiste pour que Lilian Thuram – alors incertain – soit titularisé contre l’Irlande le 7 septembre 2005. Ce dernier est à l’origine du seul but du match, ouvrant la voie de la qualification.
Zizou annonce la couleur : cette fois promis, après cette Coupe du monde, il raccroche définitivement les crampons.
Stage à Tignes : boule de neige et embrouille entre gardiens
Le 14 mai 2006, Franck Ribéry apprend qu’il fait partie des 23 Bleus sélectionnés pour disputer le Mondial. Téléfoot le suit chez lui quand le sélectionneur Raymond Domenech annonce la liste en direct à la télévision.
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Une surprise parmi les 23 : le défenseur Pascal Chimbonda est sélectionné… et ne jouera pas une minute.
Les joueurs de l’équipe de France se retrouvent pour un stage de préparation avec leurs familles et le staff dans la station de Tignes (Savoie) du 21 au 26 mai 2006.
Lors de son arrivée, Franck Ribéry balance une boule de neige sur Zinedine Zidane, comme il le raconte dans L’Equipe : « Franck Ribéry fait partie de ces mecs-là. La première fois qu’on a fait un stage en équipe de France avec lui, c’était à la montagne, à Tignes. Et il m’avait lancé une boule de neige ! Les autres joueurs étaient surpris. Sur moi ! Mais moi, quand il a fait ça, je l’ai trouvé top ! Ce n’était pas un manque de respect. Ça montrait qu’il voulait se rapprocher. Il y en a qui n’osent pas. Franck, c’était tout le contraire. Moi, je n’aurais jamais fait ça. Faire ça sur Cantona quand je suis arrivé… Des gars comme ça, comme Ribéry, on en a besoin dans un groupe. Ils font du bien. »
Et le sélectionneur Raymond Domenech d’abonder en ce sens : « Il restait encore de la neige. Il voit ça, fait des boules, en balance et ça tombe sur Zidane ! Je suis derrière, ça dure un quart de seconde mais je me fige, le temps de penser ‘merde, c’est quoi ça ?’ ! Mais Zidane éclate de rire et ils font ensuite une bataille de boules de neige. Et là, tu sais que c’est gagné… »
Le jour de l’ascension du glacier de la Grande Motte, Fabien Barthez prétexte une douleur à une jambe pour ne pas grimper. Cette nuit-là, au refuge à 3.600m d’altitude, Gallas, Saha et Chimbonda jouent aux cartes et aux dominos jusque très tard comme le montre ce reportage de Téléfoot.
Il y a aussi quelques tensions durant ce stage à Tignes : Grégory Coupet, blessé de n’être que le gardien n°2 derrière Fabien Barthez, décide de quitter le rassemblement des Bleus. Sa famille et des proches du club de l’OL parviennent à le convaincre de faire demi-tour, comme le détaille Le Parisien.
Le 28 mai 2006, Raymond Domenech s’énerve contre Thierry Gilardi en direct à Téléfoot après la diffusion d’un reportage sur l’attitude des joueurs l’équipe de France vis-à-vis du public qui ne signeraient pas d’autographes. Selon lui ce reportage est faux. Un coup de gueule du sélectionneur qui soude le groupe à quelques jours du début du Mondial.
Le SMS de Ludovic Giuly à Estelle Denis
La veille du départ en Allemagne, Djibril Cissé est victime d’une double fracture tibia-péroné de la jambe droite contre la Chine le 7 juin 2006 à Saint-Etienne. L’attaquant tricolore a eu la même blessure… à l’autre jambe deux ans auparavant avec Liverpool. Il est remplacé par Sidney Govou le jour du départ en Allemagne… préféré à Ludovic Giuly.
Ce dernier est écarté malgré ses bonnes prestations avec Barcelone. Le milieu a son explication comme il le détaille dans son autobiographie. Giuly estime que cette décision n’est pas motivée par des considérations sportives, mais par un SMS envoyé à Estelle Denis, alors compagne du sélectionneur : « J’ai fait une interview avec Estelle et je ne savais pas que c’était la femme du sélectionneur et ensuite elle m’a dit si t’es sur Paris un jour, on ira boire un café, moi je lui ai répondu ‘ok avec plaisir’, rien de plus… » Et d’ajouter : « Ensuite Domenech m’appelle pour me dire que je jouerai avec les Bleus, qu’il me faisait confiance. Mais j’ai été le voir pour lui dire que j’avais écrit un texto à Estelle ne sachant pas que c’était sa femme et je vous jure, il n’y a rien eu entre elle et moi… Il me dit oui je sais il n’y a pas de soucis. Donc j’ai donc fait la préparation les matches avant la Coupe du monde et au dernier moment de la liste, je n’y étais pas donc soit il me l’a mise à l’envers soit il ne peut pas me blairer ».
France-Suisse : hémorroïdes, alliance et carton jaune
Le 8 juin 2006, les Bleus arrivent en Allemagne au Schlosshotel Münchausen, dans le château de Schwöbber, situé dans la commune d’Aerzen à une cinquantaine de kilomètres d’Hanovre.
Les joueurs s’entraînent sur le stade municipal à 30 minutes de leur camp de base à l’image de Zidane.
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Le 13 juin 2006, la France fait ses débuts dans la compétition avec un nul face à la Suisse (0-0). Un match terne marqué par le premier carton jaune du capitaine Zidane. Et par l’entrée en jeu « remarquée » de Vikash Dhorasoo : le milieu de terrain perd du temps en galérant à enlever son alliance. Il est ensuite tout près de marquer. Relégué au rang de remplaçant pendant le tournoi, il passe ses journées à filmer la vie de l’équipe de France de l’intérieur avec une caméra amateur Super 8 et en fait un film, « Substitute », qui sort en salle quelques mois plus tard.
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Sur le banc également pour ce premier match, Florent Malouda : le milieu n’est pas encore totalement remis d’une anesthésie générale pour une opération des hémorroïdes dont il souffre depuis son arrivée en Allemagne.
Élu homme du match par la FIFA, Claude Makelele se voit offrir une chope de bière en argent.
Après ce premier match, l’ambiance est tendue. Zidane ne se présente plus à aucune conférence de presse… pourtant obligatoire en tant que capitaine des Bleus. Sa dernière intervention remonte à avant cette rencontre : « Je n’ai pas envie de me faire mal à la tête à vos questions ». Analyse de Platini : « Du moment qu’il parle avec ses pieds, c’est suffisant ».
Le lendemain, Thierry Henry se veut philosophe : « Si j’ai peur de l’élimination ? Non. J’ai peur de mourir. Je n’ai jamais peur de jouer au foot ».
Les Bleus subissent également des attaques sur leur âge. Willy Sagnol répond indirectement aux critiques du consultant Marcel Desailly : « J’en ai super rien à foutre. On est trop vieux ? Un peu de respect. Si celui qui parle est champion du monde, je lui rappelle qu’il reste des champions du monde 1998 dans l’équipe qui dispute ce Mondial. Et je lui demande de fermer sa gueule. » Et Patrick Vieira de le tacler : « D’autant plus que cette personne-là n’a pas été irréprochable en 2002, donc ça reste en travers de la gorge ». Ambiance.
Le (premier) coup de sang Zidane contre la Corée
Le 18 juin 2006, la France fait un nouveau match nul contre la Corée du Sud (1-1).
Averti à la 85e minute, Zizou est suspendu pour le prochain match après son jaune récolté contre la Suisse. Sorti par Domenech peu avant le coup de sifflet final à la 91e, il jette de rage son brassard de capitaine. En rentrant au vestiaire, il fracasse une porte du stade de Leipzig qui, depuis, a mis un cadre doré autour des traces de crampons pour immortaliser ce coup de sang.
Lors de la Coupe du monde 2006, la France fait 1-1 face à la Corée du Sud à Leipzig. En colère après ce résultat, Zinedine Zidane donne un coup de pied dans la porte du vestiaire. Depuis, Leipzig a mis un cadre doré autour des traces de crampons pour immortaliser ce geste. pic.twitter.com/5aWlEyKEVI
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Zidane revient sur ce moment dans L’Equipe : « Il (Raymond Domenech) me sort pour faire entrer David Trezeguet (90e + 1). Mais qui va le faire marquer, David ? Ce n’était pas clair. J’ai les glandes et je le lui fais savoir. Il y a plein de choses qui s’étaient aussi passées, avant. Des histoires racontées sur mon retour qui n’étaient pas la réalité. J’ai décidé de tracer mon truc à ce moment. On a même décidé de tracer notre truc ensemble. Et ça allait le faire. C’était lancé. »
Et de préciser sa colère dans France Football (au détour d’un long entretien croisé avec Michel Platini) le 1er juin 2010 : « Je ne l’ai jamais dit, mais je vais vous expliquer pourquoi, en fait (…) Je donne un ballon à Titi Henry qui, seul face au gardien, rate l’occasion. Cela arrive à tout le monde, ce n’est pas le problème. Mais dans la continuité de l’action, je prends un carton jaune qui me prive du match suivant contre le Togo. Et cinq minutes après, le sélectionneur me sort pour faire rentrer Trezeguet. Là, j’ai la rage ! Qui peut marquer un but à part Trezeguet ? Et qui peut lui donner une passe décisive, sinon moi ? Je suis là pour ça ! (…) C’est plus que du mauvais coaching. J’ai ressenti une grande frustration. Après, bon, c’est rentré dans l’ordre… »
D’autant que ce match est potentiellement le dernier de sa carrière si les Bleus se font éliminer lors du troisième match. Le lendemain, Fabien Barthez est interrogé sur l’ambiance au sein des Bleus : « Dites, vous voulez que je vous raconte la messe ? »
Sans oublier ce lapsus de Bruce Toussaint, présentateur de la matinale d’I-télé, après les deux matches nuls des Bleus mal embarqués : « Un mot pour vous dire que les obsèques de Raymond Domenech auront lieu aujourď’hui »… à la place des obsèques de l’humoriste Raymond Devos.
Lors de la dernière rencontre contre le Togo le 23 juin 2006, la France est virtuellement éliminée à l’heure de jeu. Mais les Bleus font la différence grâce à Patrick Vieira – dont c’est l’anniversaire – buteur puis passeur pour Thierry Henry pour une victoire (2-0) synonyme de qualification pour les huitièmes de finale.
Pour l’anecdote, Zidane et ses coéquipiers avaient fait leurs valises au cas où avant cette ultime rencontre de poules. Pour rien donc : l’aventure tricolore continue.
Barbecues secrets et fourgons aux vitres teintées
Pour se changer les idées et prendre l’air, les Bleus trouvent une échappatoire avant les huitèmes de finale. Pierre Repellini chargé de l’administration dans le staff de l’équipe de France de 2004 à 2010 le dévoile dans le livre de Philippe Tournon « La vie en bleus » : « Après le troisième match, je vois venir une délégation de joueurs avec Zizou, Sagnol, Makelele, Thuram qui me dit ‘Pierrot, on n’en peut plus d’être enfermés dans notre bunker, on a besoin de sortir, de se retrouver entre nous, vraiment rien qu’entre nous.’ J’en parle à Raymond qui me donne son feu vert pour trouver une solution. Avec Momo (Mohamed Sanhadi, l’officier de sécurité, ndlr), on se met en piste et on finit par dégoter une auberge hypertranquille, bien planquée avec une grande terrasse, barbecue, etc. On la bloque, on la privatise et, à partir de là, entre chaque match, les joueurs s’y retrouveront, entre eux, ils feront eux-mêmes le « barbeuc ».
Et de préciser : « On arrivera a déjouer toutes les surveillances, feinter ceux qui nous espionnent, en entassant les joueurs dans des fourgons noirs aux vitres teintées, en empruntant les accès réservés aux livraisons. Un truc de dingue, qui marchera très bien. Je ne dis pas que c’est grâce à ça qu’on est allés en finale, mais ça y a contribué, c’est sûr. »
Zidane revient dans L’Equipe sur ce déclic : « On avait pris les clés. À 100 %. On était entre nous, chaque avant-veille de match. On avait trouvé un lieu pour nous. C’était exceptionnel. On faisait venir des merguez de Berlin parce qu’il paraît que c’étaient les meilleures ! Des moments magnifiques, pendant quatre heures à table. Il y a eu une vraie cohésion. C’était dans une petite auberge perdue, à quelques kilomètres de notre hôtel. Une ambiance fabuleuse. »
Le premier de ces rendez-vous génère un quiproquo quand les membres du staff s’y présentent, croyant être de la partie. Mais les leaders du groupe leur font savoir qu’ils ne sont pas invités, que c’est juste entre joueurs.
Zidane envoie l’Espagne à la retraite
Le 27 juin 2006, la France affronte l’Espagne en 8e de finale. Le quotidien espagnol « Marca » titre ce jour-là : « On va mettre Zidane à la retraite », lui le plus espagnol des joueurs français évoluant au Real Madrid (2001-2006).
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Avant le coup d’envoi, à l’échauffement, les joueurs noirs de l’équipe de France subissent des actes racistes de la part de personnes dans le stade (cris de singe) et La Marseillaise est copieusement sifflée au moment des hymnes.
Rapidement menée, la France égalise grâce à Franck Ribéry qui marque son premier but avec les Bleus ponctué d’une course mythique pour célébrer son pion. Et les non moins célèbres commentaires de Thierry Gilardi : “Vas-y mon petit !” et « Il est génial le môme ». On note également la faute à son prénom dans l’incruste de TF1.
Après Vieira, Zidane enfonce le clou et envoie l’Espagne à la retraite en marquant le dernier but à son coéquipier Casillas (3-1).
France-Brésil, unique passe de Zidane pour Henry et samba sur le terrain
Pour l’anecdote, sur cette ultime action contre la Roja, Zizou se blesse, comme il le confie dans L’Equipe.
Le 1er juillet 2006, c’est donc blessé qu’il joue son quart de finale contre le Brésil : « L’un de mes plus beaux matches en bleu. Et que je joue blessé. Je me blesse en fait contre l’Espagne. J’ai une boule sur la cuisse. Presque personne ne l’a su. Je passe des examens. Ils me disent que je ne joue pas contre le Brésil… Je dis : ‘Quoi ? Hors de question !’ Le staff médical a tout fait pour que je joue. Et j’ai joué ! Chaque match pouvait être mon dernier. J’avais tellement ça dans la tête qu’il était impossible que je ne joue pas contre le Brésil. Je voulais profiter de chaque seconde. »
Zidane avec un bandage à la cuisse droite face au Brésil au Mondial 2006
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Avant la rencontre, les Bleus sont motivés comme jamais à l’image de Claude Makelele et sa réplique culte : « Brésil ou pas, m’en bats les couilles. Ronaldinho, machin, chouette… Rien à foutre ! »
La France élimine le tenant du titre (1-0) grâce à un coup franc : but de Thierry Henry sur un service de Zizou. Et le capitaine des Bleus de revenir sur cette première combinaison fructueuse entre les deux joueurs : « Au moins, il y a eu une passe décisive, ce n’est pas zéro, on a sauvé l’honneur, en quelque sorte ! D’ailleurs, quand il a marqué, ce jour-là, je suis allé le voir et je lui ai dit : ‘Enfin, ils ne pourront plus le dire !’ J’ai dû lui mettre des caviars qu’il n’a pas concrétisés et il a bien dû faire des super appels mais j’ai merdé les passes… C’est pas possible autrement. » En réalité, il existe une deuxième passe « décisive » de Zidane pour Henry lors de l’Euro 2000 contre le Danemark. Une passe officiellement comptée comme telle même s’il s’agit d’un une-deux à 30 mètres du but de Fabien Barthez. Maigre bilan du duo Zidane-Henry en 57 matches ensemble avec les Bleus.
Sur le but, Roberto Carlos semble absent, plus préoccupé à refaire ses lacets. Pour Willy Sagnol : « Même en division de district, on ne voit pas des buts comme ça ».
Mais le défenseur brésilien s’est toujours défendu en assurant « ne pas être au marquage de Thierry Henry » comme il l’explique à Colinterview.
La dernière défaite du Brésil en Coupe du monde remonte au 12 juillet 1998, en finale, et déjà contre la France. Et encore avant en 1986. Bête noire.
Chirac dans le vestiaire, cigarette et danse de Zidane sur la table
Auteur d’un match XXL et sans doute le plus abouti avec les Bleus, Zidane est qualifié de « magicien » par Pelé. Même son de cloche chez Aimé Jacquet : « Ce soir-là, le Brésilien, c’était Zidane ». Thierry Henry : « Ce qu’a fait Zidane, c’est français ». Et Fabien Barthez : « Zizou n’a pas été bon, il a été fantastique, étincelant ! C’est un maître, et encore, les mots ne suffisent pas… »
Dans le vestiaire tricolore, c’est la folie, comme le raconte Zidane dans L’Equipe : « Moi, monter sur une table et danser, il faut vraiment que ce soit exceptionnel. Dès qu’il y a deux personnes, je ne peux plus le faire… Alors devant quarante, il faut vraiment que ce soit l’euphorie.
Et de préciser la musique : « Sur de la disco. Il fallait un truc qui bouge. Tout le monde était mort de rire, bien sûr, parce qu’on ne peut pas dire que je sois un grand danseur ».
Zidane se souvient de la présence du président de la République : « Quand on revoit les images qui sont sorties, on voit l’ambiance entre nous. C’est la magie. Ribéry avec Jacques Chirac, c’est énorme ! Franck apostrophait le président comme si c’était un copain du quartier. On a rigolé. Je n’y croyais pas à côté ! »
Le médecin des Bleus Jean-Pierre Paclet se souvient de ce moment sur RMC : « J’ai un souvenir extraordinaire de la visite de Jacques Chirac après le match contre le Brésil où il voulait absolument voir Zizou, Willy, Makelele… Je lui avais dit : ‘Attendez un peu’ parce que je savais ce qu’ils étaient en train de faire ces couillons ! Ils étaient en train de se taper une petite cigarette après le match. C’était merveilleux de voir le président de la République face à un joueur qui était assis sur le siège des toilettes et un autre dans le lavabo. Ça, c’est une scène qui m’a marqué. »
Un match qui marque également les habitants du Brésil. Petrucio Santos donne un nom pas commun à son fils, lui qui est tombé amoureux de la France qu’il a découverte quelques années plus tôt lors d’un voyage. Il s’agit de : Zinedine Yazid Zidane Thierry Henry Barthez Éric Felipe Silva Santos !
Un Brésilien appelle son fils "Zidane Henry Barthez" né juste après la Coupe du monde 2006. Fan de la France et de son équipe, ce père a voulu rendre un hommage à ces joueurs. pic.twitter.com/VD3aoeJu7Y
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France-Portugal : « Je pense qu’on espère de gagner »
Le 5 juillet 2006, place à la demi-finale de folie, remake de celle de l’Euro 2000. Franck Ribéry est chaud : « Je pense qu’on espère de gagner contre le Portugal. On est des joueurs qu’on va vite avec le ballon. »
Un paparazzi immortalise Zidane avec une cigarette à la terrasse de l’hôtel à quelques jours de la demie.
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Ce qui n’empêche pas le n°10 tricolore de transformer le penalty (1-0) et d’envoyer la France en finale.
De son côté, « Fabulous Fab » reste impeccable : Fabien Barthez égale le record de l’illustre Peter Shilton avec 10 clean sheets en phase finale de Coupe du monde, soit 10 matchs terminés sans avoir encaissé le moindre but.
A l’occasion de ce match, Florent Malouda révèle la devise de l’équipe de France pour cette compétition : « On vit ensemble, on meurt ensemble. »
France-Italie, Zidane entre ange et démon
La France retrouve l’Italie en finale, remake de celle de l’Euro 2000. Raymond Domenech : « J’ai toujours parlé du 9 juillet, mais je n’avais pas précisé l’heure : ce sera aux alentours de 22h ou un peu plus tard. Car une finale se joue pour être gagnée ». Perdu.
La veille, les Bleus passent une mauvaise nuit et dorment mal à Berlin. La raison ? Leur hôtel est situé à 700m de la porte de Brandebourg, là où se déroule la Fanfest avec tous les décibels qui vont avec.
Côté italien, pas trop de pression comme le confie Andrea Pirlo : « Le 9 juillet 2006, le jour de la finale, j’ai passé l’après-midi à faire la sieste et à jouer à la Playstation. Le soir je suis sorti et j’ai gagné la Coupe du Monde. »
Gennaro Gattuso est un peu plus inquiet : « Contre Zidane, vous n’avez qu’une chose à faire : prier ».
La première panenka dans une finale de Coupe du monde
Le coup d’envoi de la finale est donné à 20h. La France mène rapidement au score après un penalty réussi de Zidane sur une « Panenka » à la suite d’une faute du défenseur italien Marco Materazzi sur Florent Malouda (1-0, 7e).
C’est la première fois que ce geste incroyable est réalisé en finale d’un Mondial. Et lors d’un penalty dans un grand match, Zizou est intraitable : « Je n’éprouve rien quand je frappe. Je fais le vide, ça vient tout seul, je suis toujours extrêmement concentré, plus rien n’exsite autour de moi ».
Zidane revient dans L’Equipe sur sa panenka : « Tout le monde m’a dit que j’étais fou, mais j’étais tout sauf fou. Il y avait Buffon en face et il me connaissait très bien. Il savait que je tirais les penalty à la droite du gardien. Si j’avais été fou, j’aurais tiré là où il allait plonger. La solution, pour moi, était donc de faire ça. Mais, forcément, pour tout le monde, je suis fou parce qu’on ne fait pas ce geste en finale de Coupe du monde. Mais on était à la 7e minute et je me disais qu’il en restait encore 83, si je le ratais… »
Et de préciser : « Je suis obligé de la tenter. Même si je la rate, je peux me rattraper derrière. Il reste du temps. Et j’ai en face l’un des plus grands gardiens du monde avec “Gigi” (Buffon). Il me connaît. Je dois le surprendre. Ça dure dix secondes dans la tête. Je n’ai jamais fait de panenka. Mais ce n’est pas un manque de respect. Je sais que certains gardiens peuvent l’interpréter comme cela. Mais ce n’est pas le cas, là. Je n’y vais pas pour ça, pour humilier. J’y vais pour marquer. »
Mais les Bleus concèdent rapidement l’égalisation sur une tête du même Marco Materazzi (1-1, 19e). Le premier tournant de la rencontre avant la blessure à l’heure de jeu de Patrick Vieira, auteur d’une compétition incroyable.
Le score de parité ne bouge plus entre les deux équipes (1-1) jusqu’à la fin du temps réglementaire.
Le coup de boule de Zidane à Materazzi
Prolongation au stade olympique de Berlin. Zidane manque de doubler la mise sur une tête à bout portant, repoussé par un arrêt-réflexe du gardien Gianluigi Buffon.
Il est 22h16. Le capitaine des Bleus assène un nouveau coup de tête… cette fois à Marco Materrazzi à la 107e minute. Après quelques minutes de flottement, Zidane est exclu à la 110e minute.
Pour l’anecdote, on croit dans un premier temps que David Trezeguet est le coupable. Mais c’est l’une des nombreuses caméras de réalisation qui apporte la réponse aux téléspectateurs.
Le commentaire culte de Thierry Gilardi en commentant les images sur TF1 : « Oh Zinedine, pas ça Zinedine, pas aujourd’hui, pas maintenant, pas après tout ce que tu as fait. Aïe, aïe, aïe »
Pourquoi ce coup de boule ? Voici les versions des deux protagonistes. Le 18 août 2007, Materazzi rejoue la scène pour le magazine « TV Sorrisi e Canzoni » : « J’ai tenu son maillot pendant quelques secondes seulement, il (Zidane) s’est tourné vers moi, il m’a parlé en raillant, il m’a regardé avec une super arrogance, de haut en bas : ‘Si vraiment tu veux mon maillot, je te le donnerai après’. Je lui ai répondu avec une insulte, c’est vrai. Et cette insulte était donc : ‘Je préfère ta putain de sœur' ».
Une version que le défenseur italien confirme des années plus tard au Times en avril 2024 et dans une interview mise en ligne le 7 avril 2023 sur la chaîne YouTube IFTV :
“Zidane offered me his jersey, I said no I prefer his sister”
— Italian Football TV (@IFTVofficial) April 7, 2023
– Marco Materazzi on what was really said before he got headbutted pic.twitter.com/0XlVrgeJso
Zidane livre sa vision dans L’Equipe : « Ce jour-là, ma maman est très fatiguée. J’ai plusieurs fois ma sœur au téléphone dans la journée. Je sais que ma maman n’est pas bien mais ce n’est pas très grave non plus. Ça m’interpelle néanmoins. Je reste quand même concentré. Mais ce sont des choses qui se bousculent. La pression, ceci, cela. Lui (Materazzi), il ne me parle pas de ma mère. Il a souvent dit qu’il n’avait pas insulté ma mère. C’est vrai. Mais il a insulté ma sœur, qui était auprès de ma maman à ce moment-là. Sur un terrain, il y a déjà eu des insultes. Tout le monde se parle, parfois mal, mais tu ne fais rien. Là, ce jour-là, il s’est passé ce qu’il s’est passé. Il a déclenché quelque chose en parlant de ma sœur Lila. L’espace d’une seconde. Et c’est parti… Mais après, il faut accepter. Je ne suis pas fier mais ça fait partie de mon parcours. À ce moment-là, j’étais plus fragile. C’est parfois dans ces moments que tu peux faire quelque chose qui n’est pas bien… »
Et de conclure : « Ça se termine comme ça. Thierry Gilardi avait raison aux commentaires : ‘Pas comme ça…’ Mais voilà. C’est comme ça. C’est dur. Mais c’est ma carrière. L’histoire de ma vie. »
Regrette-t-il son geste ? Des excuses auprès des autres oui, mais pas de regrets comme il l’explique quelques jours après la finale le 13 juillet 2006 sur Canal+ au micro de Michel Denisot : « Bien sûr que ce n’est pas un geste à faire, je tiens à le dire haut et fort. Ma réaction n’est pas digne. Surtout parce que cela a été vu par deux ou trois milliards de téléspectateurs et des millions et des millions enfants qui ont regardé cela. Auprès d’eux, je m’en excuse. J’ai des enfants , je sais ce que c’est. Je m’excuse auprès des éducateurs également, qui sont là pour leur montrer les choses à faire et à ne pas faire. Je ne peux pas regretter mon geste car cela voudrait dire qu’il avait raison de dire tout ça. Je ne peux pas. Je ne peux pas dire cela. Il n’avait pas raison de dire tout ce qu’il a dit. »
Et de préciser : « Il n’y avait pas de contentieux avant. Même s’il y a toujours des frictions avec certains joueurs. Il m’accroche le maillot et je lui dis d’arrêter et que, s’il le veut, je l’échange à la fin da match. Et là, il me dit des mots qui sont très durs (…) Je suis un homme avant tout. Ce sont des mots plus durs que certains gestes. J’aurais préféré prendre une droite dans la gueule plutôt que d’entendre cela. »
Dans une interview à L’Equipe en 2010, Raymond Domenech revient sur cette 107e minute : « J’ai vu qu’il se passait quelque chose, je vois Buffon qui arrive en courant, Trezeguet au milieu. Je me suis souvenu du match en Israël où David avait répondu à un défenseur avec un coup de tête. Je me dis : ‘Là il y a un coup tordu’. Le ballon repart avec Wiltord. Je hurle : ‘Joue, ne t’arrête pas.’ On a été fair-play. S’il continue, s’il repart de l’autre côté, Buffon retourne dans ses buts , l’autre là, le grand (Materazzi, ndlr), il se relève, et c’est fini. Pas d’arrêt de jeu. »
Le coup de boule fait le tour du monde, au point d’en devenir une sculpture.
Et un geste détourné à l’infini qui vaut notamment une chanson « Zidane il a frappé » et un sketch des Guignols de l’Info.
Les Guignols de l'Info parodient Zidane après son coup de boule lors de la finale du Mondial 2006 pic.twitter.com/dF5yNQKtkw
— UN TRUC DE FOOT (@untrucdefoot) August 5, 2022
Zidane donne son brassard à Fabien Barthez et quitte le terrain en laissant ses coéquipiers à dix contre onze sans un regard pour Raymond Domenech – qui applaudit ironiquement la décision arbitrale – ni pour le trophée de la Coupe du monde lorsqu’il passe à côté pour regagner les vestiaires après le 14e carton rouge de sa carrière.
Arbitrage vidéo avant l’heure ?
Zidane a bien failli ne pas être sanctionné. En effet, Horacio Elizondo, l’arbitre central, ne voit pas le geste comme il le raconte à RMC en avril 2020 : « À aucun moment je n’ai pu le voir. Le jeu se trouvait dans la direction opposée. Quand le ballon est revenu au milieu du terrain, j’ai vu qu’un joueur non identifié avec un maillot bleu (celui des Italiens, ndlr) se trouvait au sol et qu’il ne se levait pas. (…) Alors j’ai couru vers l’action et j’ai demandé à mes assistants, tant au premier qu’au deuxième, s’ils avaient observé quelque chose de spécial. Ils m’ont tous deux répondu qu’ils n’avaient rien vu ».
C’est le quatrième arbitre, l’Espagnol Luis Medina Cantalejo, qui se manifeste dans son oreillette : « Il me dit rapidement que Zidane a mis un coup de tête à Materazzi. Je lui demande comment il a vu cela, s’il s’agissait d’une agression ou d’un tête-à-tête. Il me dit que c’est un terrible coup de tête. Carton rouge »
Dès lors, comment expulser un joueur sans avoir vu la faute ? C’est le dilemme auquel est confronté l’homme en noir (enfin, en rouge ce soir-là). Il décide donc de « feinter » comme il le détaille au magazine britannique The Blizzard en 2013 : « Je vais alors voir Dario (un des arbitres de touche, ndlr) en sachant qu’il ne savait rien ! Pourquoi ? Si vous allez voir l’assistant, tout le monde comprend que c’est parce qu’il va vous dire quelque chose. Je vais donc voir Dario et lui dis juste ‘concentré !’ Je me retourne, m’approche de Zidane et sors le carton rouge. (…) C’était une sorte de feinte. »
Le 4e arbitre arbitre a-t-il eu recours à la vidéo sur un écran de contrôle situé au bord du terrain ? Négatif, selon Horacio Elizondo : « Après le match, je suis retourné lui demander, parce que des gens disaient qu’il aurait pu le voir sur un écran. Mais il a continué à me dire qu’il l’avait vu sur le terrain. Et nous avons vu des images montrant que le quatrième arbitre était tout le long de l’action à son poste, au milieu du terrain. À aucun moment il n’était ailleurs ».
Ce qui n’est pas l’avis du camp tricolore. Arsène Wenger, en direct sur TF1, décrypte : « Ils essaient de faire intervenir le 4e arbitre sur la télé ».
En conférence de presse d’après-match, Raymond Domenech dégaine en ironisant : « On vient d’instaurer l’arbitrage vidéo parce que c’est le quatrième arbitre qui a rapporté les faits. L’arbitre de touche n’avait rien vu. C’est une nouvelle règle qui est mise en place. Vive la vidéo dans le football ! »
Plus tard, une enquête FIFA assure que le quatrième arbitre a vu la scène de ses propres yeux.
Pour l’anecdote, dix mois plus tard, le carton rouge adressé à Zinedine Zidane est dédicacé par l’arbitre et offert à Nestor Kirchner, le président argentin de l’époque… qui nomme l’homme en noir au gouvernement en 2007, comme le note Le Parisien.
Trezeguet rate son TAB, des joueurs esquivent la séance
Réduits à dix, les Bleus conservent le match nul jusqu’à la fin de la prolongation (1-1). Place aux tirs au but.
Tout le monde marque… sauf David Trezeguet. Quatrième tireur, l’attaquant tricolore – entré en jeu – voit sa frappe s’écraser sur la barre transversale de son coéquipier Buffon. Echec de l’auteur du but en or lors de la finale France-Italie à l’Euro 2000 et de celui qui a mis son TAB contre l’Italie en quart de finale de la Coupe du monde 1998.
Face à Fabien Barthez parti trois fois du bon côté, Fabio Grosso termine le travail avec un 5/5 pour l’Italie qui décroche son quatrième sacre mondial.
La France perd sa première finale dans une grande compétition après 1984, 1998 et 2000.
Zidane confie : « Ce tir au but, je l’ai vu tout seul, sur une petite télé, ce n’était pas un moment génial« . Et de préciser à Michel Denisot : « Dans le vestiaire, ce n’est pas facile surtout quand il va y avoir la séance de tirs au but. Vous n’êtes pas seul au monde mais vous l’êtes quand même. Le sort des tirs au but, vous savez, un jour c’est pour vous, un jour c’est contre vous. Je ne pense pas que, même si j’avais tiré mon penalty, cela aurait changé quelque chose. Je ne peux pas vous dire avec certitude que cela aurait changé quelque chose si j’avais été sur le terrain les dix dernières minutes. Peut-être que oui, peut-être que non. »
Inconsolable, David Trezeguet fond en larmes. Gianluigi Buffon le connaît bien. Les deux joueurs jouent ensemble en club : « On en frappait quelquefois après l’entraînement. Il m’arrivait de lui en arrêter, pour lui ce n’était pas une situation idéale. »
David Trezeguet : « Après mon penalty raté, Maradona est venu me réconforter. On a beaucoup parlé ce soir-là, ça m’a permis de mieux digérer la défaite. Ce soir-là, le plus grand de tous les temps est venu me réconforter alors que Domenech n’est même pas venu m’adresser un mot… »
Pour l’anecdote, Wiliam Gallas révèle sur RMC qu’il devait être le dernier à exécuter son tir au but : « A la Coupe du monde 2006, j’étais le 5e tireur, personne ne le savait. Il y a des joueurs qui ne voulaient pas tirer. Dès qu’il y a eu la séance de tirs aux buts, des joueurs ont enlevé leurs chaussures ».
Échange secret entre Zidane et Chirac
22h32. Coup de sifflet final. Lors de la cérémonie protocolaire, les Bleus s’échappent en file indienne quand Fabio Cannavaro s’apprête à soulever la Coupe du monde.
Seul un titulaire – Thierry Henry – et cinq remplaçants – Dhorasso, Coupet, Landreau, Givert et Boumsoung – assistent à la remise du trophée. Et ce malgré la demande de Raymond Domenech aux Bleus de rester.
— Football Pictures That Go Hard (@hardfootypix) January 13, 2023
A la fin du match, Jacques Chirac descend dans les vestiaires pour s’isoler avec Zidane pendant 10-15 minutes comme le raconte Jean-Baptiste Guégan, co-auteur du livre « La République du Foot ».
Mais cette anecdote de Zizou et Chirac juste après la Finale 2006 👀 pic.twitter.com/OVmcHEFugs
— Rivenzi (@Rivenzi_) April 2, 2022
Un échange secret entre les deux hommes dont le contenu n’a jamais fuité. Le chef de l’Etat évoque ce moment dans les colonnes de Ouest-France en 2010 : « La Coupe du monde en Allemagne m’offrira la possibilité de suivre un parcours exceptionnel, terminé sur un coup du sort dans les circonstances que l’on sait. J’aurai, à l’issue de la finale perdue, une conversation privée avec Zinedine Zidane, dans le vestiaire. Un échange intense. Un échange que je garde en mémoire. Un échange avec un homme blessé, pour lequel j’ai depuis plus de dix ans, énormément d’estime ».
Zidane s’excuse dans le vestiaire, Domenech le fait applaudir
Dans le vestiaire, Zidane s’excuse auprès de ses coéquipiers comme il le raconte en 2010 dans « El Pais » : « Après le match, je suis entré dans le vestiaire et je leur ai dit : ‘Pardonnez-moi. Cela ne change rien mais je vous demande pardon’. Mais à lui (Materazzi) je ne peux pas. Jamais, jamais… Ce serait me déshonorer… Je préfère mourir' » Et de préciser : « Si ça avait été Kaka, un type normal, un type sympa, bien sûr que j’aurais demandé pardon. Mais à ce type-là… »
Et Jean-Alain Boumsong de préciser dans France Football : « Quand on arrive dans le vestiaire, on prend nos téléphones et on nous dit ce qu’il s’est passé parce qu’on ne sait pas vraiment ce que Zizou a fait. Lui est là, il est profondément abattu. Le président Chirac descend nous voir et tient un discours assez cool. Il nous fait part de sa fierté pour le parcours que l’on a réalisé. Et puis il y a les excuses de Zizou pour avoir un petit peu lâché ses partenaires par ce geste stupide. Il demande pardon à tout le monde. Raymond Domenech aussi prend la parole. »
Le sélectionneur a un mot pour tous et fait applaudir son capitaine, comme il le raconte dans son autobiographie « Tout seul« : “Je tiens à vous remercier pour tout ce que vous avez accompli tout au long de ce parcours, avec une attention spéciale pour Zizou. Ce qui lui est arrivé est très grave, très lourd, mais c’est comme ça, et doit ne pas nous faire oublier que Zizou a fait une immense carrière. Je vous demande donc de l’applaudir.”
► Voici les images captées par Vikash Dhorasoo avec sa caméra dans l’intimité du vestiaire le jour de la finale.
Sur l’exclusion de Zidane, les réactions des joueurs sont partagées. Reproche de Lilian Thuram : « Dans la situation, le fautif c’est Zizou » tout comme Claude Makelele à demi-mots : « Je lui pardonne, mais d’un côté, je ne lui pardonne pas avec lui on gagnait la coupe« .
Même son de cloche du côté de Willy Sagnol – en pleurs dans les bras de Barthez à la fin du match – qui lui en veut : « Comment je vais aller lui dire que j’ai les boules contre lui, contre Zizou ? Comment je pouvais aller lui dire ça ?! C’est humain. Mais Zizou était déjà tellement au trente-sixième dessous… Et puis, même, tu n’es pas trop bête non plus, donc tu vas te souvenir de certaines choses : son match contre le Brésil en quart de finale, son retour un an avant le Mondial sans lequel on n’y allait pas… »
Et de préciser à RMC que ce geste laisse des traces entre les deux hommes : « On ne s’est pas parlé pendant presque deux ans. En 2008, après le championnat d’Europe, je devais me marier. C’est ma femme qui m’a dit de le faire venir. Je l’ai rappelé. Il ne pouvait pas venir le soir, à la fête, mais il m’a fait le plaisir de venir en fin de matinée. On a pris un apéritif ensemble. On a bien discuté, puis la vie est repartie. »
De son côté, Thierry Henry met le collectif en avant : « On a gagné ensemble, on a perdu ensemble »
Et Barthez de conclure dans L’Equipe : « Est-ce qu’on lui en veut ? Moi pas du tout. Au contraire, moi je m’en veux. De ne pas l’avoir sorti du trou. C’était à nous de le sortir du trou. Une fois qu’il a pris ce rouge, c’était à nous de remporter… C’est là où je m’en veux. C’est un truc que je n’ai pas digéré, 15 ans après. Plus que d’aller gagner un deuxième titre personnel, c’était de le gagner avec lui. »
Est-ce humain de lui en vouloir ? Réponse cash du gardien : “Si t’es un gros connard, c’est humain.”
Zidane élu meilleur joueur du Mondial
Raymond Domenech rêvait d’une autre sortie de Zidane : « C’est dommage et c’est triste de finir ainsi alors qu’il a fait une très grande Coupe du monde. J’aurais préféré le sortir, moi, à cinq minutes de la fin afin qu’il reçoive l’ovation qu’il méritait. Mais voilà… » Et de préciser à L’Equipe en 2010 : « Parce que pour moi on allait marquer. Alors je l’aurai sorti devant un milliard de téléspectateurs, 80.000 spectateurs, et même les Italiens l’auraient applaudi. C’est une vraie erreur, j’aurais dû le mettre dans la confidence ».
Ce qui n’empêche pas Zizou d’être élu meilleur joueur de cette Coupe du monde par la FIFA, un choix arrêté après les demi-finales.
Et l’homme de la finale ? Pour la FIFA, il s’agit de Pirlo. Mais pas pour Raymond Domenech : « C’est Materazzi. En finale de Coupe du Monde, tu marques un but, tu fais virer le meilleur joueur adverse et tu marques ton tir au but… »
Materazzi, une personne avec qui William Gallas ne partira pas en vacances : « Quand vous gagnez avec de la triche, c’est inadmissible. J’accepte quand l’équipe adverse gagne loyalement mais de cette façon-là, non (…) Vous savez, quand vous voyez un joueur comme ça (Materazzi, ndlr) vous avez envie de lui péter la gueule. C’est de la triche mais ce sont les Italiens. »
Parmi les autres réactions, celle de Fidel Castro : « Je n’approuve pas qu’on ait sanctionné l’Algérien. Je l’ai vu et il a dû fortement être insulté pour réagir ainsi. »
Celle de son sélectionneur en 1998, Aimé Jacquet : « Zinedine est un réactionnel. Materazzi le savait… »
Enfin, Nicolas Anelka (non sélectionné) : « Quand j’ai vu son coup de boule, je ne devrais pas dire ça, mais j’ai eu deux fois plus de respect pour lui. Les banlieusards ont dû apprécier ».
Pour l’aneccdote, de nombreux médias préparent leur une sur Zidane mais se retouvent « coincés » à devoir changer leur angle avant le bouclage pour envoyer à l’impression, à l’image de France Football.
L’équipe de France a failli défiler sur les Champs-Elysées
Le lendemain, le 10 juillet 2006, les joueurs auraient dû défiler à Paris le lundi même en cas de défaite.
Une demande de l’Elysée que Raymond Domenech refuse comme il le détaille dans le documentaire “Sur la route du derby” diffusé sur L’Equipe en 2017 : “Ils voulaient qu’on défile sur les Champs-Elysées en 2006. J’ai dit : ‘Attendez, je ne suis pas Stéphanois, je ne défile pas si j’ai perdu (rires). C’est pas possible, je n’y arriverai pas !’ L’Elysée nous a appelés, le président de la République (Jacques Chirac à l’époque, ndlr) m’a mis la pression. J’ai dit : ‘Non, ne comptez pas sur moi. Si on ne gagne pas, je ne défile pas.’”
Pas de parade sur la plus belle avenue du monde donc, mais une réception à Paris et un déjeuner à l’Elysée tout de même avec le président Jacques Chirac le 10 juillet 2006.
Après avoir mangé, les joueurs et le staff se rendent place de la Concorde… et font une apparition au balcon de l’hôtel de Crillon pour saluer des milliers de personnes venues les applaudir.
Là où il souriait le 3 juillet 2000 après son but en or lors de la finale de l’Euro contre l’Italie, David Trezeguet pleure à chaudes larmes six ans et une semaine plus tard.
Comme à son habitude, Fabien Barthez s’éclipse. Il est le seul joueur absent des festivités pour retrouver « son » monde, loin de l’agitation collective. Officiellement excusé « pour des raisons familiales ».
Lilian Thuram résume dans un sourire cette épopée en faisant allusion à l’ascension du glacier de la Grande Motte lors du stage préparatoire de Tignes : « C’était plus difficile d’aller en haut que d’aller en finale de la Coupe du Monde ».
Parmi les paris en cas de sacre des Bleus, celui de Thierry Roland qui promet de défiler nu sur la place de la Concorde. Ce n’est pas passé loin.
Après 1998, il faudra donc attendre 2018… et la deuxième étoile pour voir l’équipe de France de football de nouveau défiler sur les Champs-Elysées dans un bus à impériale pour célébrer son titre avec plusieurs centaines de milliers de supporters dans la rue.
Zidane et Materazzi sanctionnés par la FIFA
Le 18 juillet 2006, Zidane et Materazzi sont auditionnés par la FIFA.
Résultat : Zidane écope de trois matches de suspension et 4.800 euros d’amende et Materazzi de deux matches et 3.200 euros d’amende.
Selon la FIFA, il ressort de l’audition des deux joueurs que Zidane aurait réagi à des insultes comme « Putain de ta mère » et « Putain de ta soeur » mais en aucun cas à des propos « à caractère raciste ».
Cannavaro Ballon d’or et chambré par ses coéquipiers
Après ce Mondial 2006, le foot reprend sa routine.
Exemple avec cette pub mettant en scène Franck Ribéry et Luca Toni – coéquipiers au Bayern Munich – qui se chauffent dans les travées de l’Allianz Arena : « T’es champion du monde toi ?! Et tu me fais ça !?”
Fabio Cannavaro est sacré Ballon d’or 2006. Une récompense qu’il reçoit des mains de sa compatriote, l’actrice Monica Belucci. Sur le podium, le capitaine italien devance son coéquipier Gianluigi Buffon et Thierry Henry, finaliste du Mondial.
Un titre contesté par certains et même moqué (gentiment) par ses coéquipiers Del Piero et Totti : “Si j’avais été Cannavaro je n’aurais même pas pris le trophée. J’aurais dit à sa place : ‘Je vous adore mais le foot je le laisse aux autres, c’est pas pour moi…’”
Del Piero et Totti se moquent du Ballon d'or 2006 reçu par leur coéquipier Cannavaro : "Si j'avais été Cannavaro je n'aurais même pas pris le trophée. J'aurais dit à sa place : 'Je vous adore mais le foot je le laisse aux autres, c'est pas pour moi…'"pic.twitter.com/NYRrQO5l7u
— UN TRUC DE FOOT (@untrucdefoot) August 17, 2022
Pour l’anecdote, le lendemain de la Coupe du monde, Cannavaro – accompagné de Zambrotta – apporte le trophée à Gianluca Pessotto, son ancien coéquipier hospitalisé après une tentative de suicide. L’ancien défenseur de la Juventus a sauté d’une fenêtre au siège du club. Un drame que la Squadra Azzura apprend au milieu de la compétition avant de la remporter.
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